Le Fléau de Farliss

Le Fléau de Farliss

 

En mémoire de Farliss, le Grand

Héros du village Tardim

 

Aussi loin que je puisse me souvenir, mes premiers pas d’aventurier me menèrent dans la région reculée des Monts du Tylon. Je me trouvais à la tombée de la nuit de mon dixième jour de voyage et mon impatience de novice en vue d’entrer en confrontation avec une Horreur grandissait à chacun de mes pas. Toujours bredouille, privé de corruption à purifier, je me décidai à trouver refuge dans l’auberge accueillante d’un petit village nain. Après avoir commandé le repas du soir et une bouteille de vin, je me dirigeai vers une table occupée par un nécromancien à la silhouette titanesque renforcée par une impressionnante armure de plaques noire. Ce dernier n’était pas des plus loquaces et lui arracher les plus simples banalités tenait déjà du plus brillant des exploits. Cependant, ses atours me rappelant la Guilde des Nécromanciens de Kratas, je réussis à obtenir de lui un semblant d’intérêt et de conversation lorsque je mentionnai le nom de la Cité des Voleurs. Il s’agissait de Ror Bar Kritus, membre de la Guilde de Kratas, d’après lui dans la région pour réunir quelques composants pour sa sombre magie. Tandis que je finissais mon repas, je fus attiré par une conversation qui se tenait à une table assez proche...

 

Cinq personnes s’y trouvaient : un nain et un humain vêtus à la manière des villageois, un sylphelin robuste aux allures de guerrier, une sylpheline manifestement versée dans les arts élémentaires et un ork dont l’accoutrement trahissait son métier de nécromancien. Le nain et l’humain s’appelaient respectivement Rutos et Tanis. Ils virent d’un bon œil mon arrivée dans leur petite assemblée, en effet, ils étaient à la recherche d’aventuriers. De manière distraite, tout en sirotant le vin de la taverne, je me surpris à écouter leur histoire qui piqua véritablement au vif ma curiosité lorsqu’ils prononcèrent le mot...Horreur...

 

Selon eux, à quelques jours de là, se trouvait le village Tardim, récemment bâti par ses habitants à la sortie de leur kaer, après le Châtiment. Ce petit bourg, situé à une petite heure de leur ancien refuge leur avait amené bonheur et la prospérité jusque là. Ces dernières semaines, plusieurs villageois avaient disparu dans l’ancien kaer et Strathem, l’elfe sorcier puissant protecteur du village, s’était rendu dans le refuge qui lui servait de laboratoire et de bibliothèque, pour retrouver les malheureux.

 

Avant de partir, l’elfe avertit le maire qu’une Horreur devait se cacher derrière ce méfait. Or, Strathem avait disparu depuis deux semaines et les villageois désespérés venaient quérir l’aide d’aventuriers pour mettre fin aux périls qui hantaient leur bourgade. Les aventuriers présents semblaient tous enthousiastes à l’idée de se rendre au village de Tardim, surtout Flip, la Tempête qui n’arrêtait pas de jacasser de son balbutiement sylphelin. Anaya, Cristal de Neige souhaitait rétablir promptement l’équilibre de la région et se joignit ainsi au groupe. Quant à Sargosh, Triste Tombe, ses desseins semblaient aussi sombres qu’impénétrables, rien d’étonnant pour un nécromancien. Pour ma part, l’idée même de rencontrer pour la première fois une Horreur me fit trembler d’impatience, je me joignis au groupe…

 

Le lendemain, nous partîmes tous les six, en direction du village Tardim, pour y arriver trois jours plus tard, au terme d’un voyage paisible. Les gens nous accueillirent tels des héros, des héros qui pourtant n’avaient rien réalisé, plus dure en serait la chute en cas d’échec... Manoar, le nain, maire du village Tardim, nous expliqua à nouveau les problématiques disparitions dans la population du village Tardim et nous raconta la légende de Farliss, le Grand, héros légendaire de leur village.

 

Il s’agissait d’un adepte troubadour originaire du Landis qui avait, avant le Châtiment, quitté Barsaive pour se rendre à la Bibliothèque Eternelle de Théra, persuadé qu’il s’agissait du seul moyen de sauver les Barsaiviens de la venue des Horreurs. Il étudia auprès de l’Erudit Martyr, qui découvrit l’existence des Horreurs, et auprès de Jaron, l’Eternel, créateur des rites de passage et de protection des kaers. Ravi et ébloui par l’investissement des deux érudits dans le but de sauver leurs semblables, il n’eut de cesse alors de parcourir le monde afin de louer leurs savoirs et leurs exploits, grâce à l’art noble du troubadour dont la troublante Astendar garde jalousement les secrets.

 

Le maire ajouta que la tombe de Farliss se trouvait dans le kaer de Tardim et qu’en aucun cas celle-ci ne devait être profanée, au cours de nos investigations sur la disparition de Strathem et des villageois, dans le refuge souterrain. Après avoir négocié nos récompenses et avoir pris une bonne nuit de repos, nous prîmes la route, le lendemain, jusqu’à l’entrée du kaer, endroit où le maire retourna au village après nous avoir accompagné et confié la carte du refuge.

                              

Aidés de flambeaux placés à intervalles réguliers dans le couloir d’entrée du kaer, nous découvrîmes dans un premier temps les quartiers de vie...déserts. Les jardins et les potagers, si vitaux pour les gens à l’époque du Châtiment, n’étaient que bourbe et vieux débris de végétations pourrissantes. Même les cuisines avaient été vidé, les ustensiles récupérés, aucune trace de Strathem ni des villageois, mis à part, peut-être, plusieurs traces de pas à l’entrée du kaer. La découverte la plus étonnante survint dans la salle centrale occupée par l’ancien marché. Mis à part les impressionnants gouffres béants laissés par les quartzs luminescents vendus pour assurer la construction du village, notre attention se concentra sur l’antichambre réservée à la tombe de Farliss.

 

Il s’agissait d’un mausolée sur lequel était gravée une épitaphe en l’honneur du héros. Dans un des recoins de la salle, Strathem gisait au sol, les traits tirés par la terreur, sans aucun doute mort dans d’atroces souffrances. L’elfe portait à la ceinture une dague dont les sylphelins ne tardèrent pas à détecter la magie et serrait dans sa main, un plan du kaer… A la différence de la carte que nous possédions déjà grâce à Manoar, celle de Strathem affichait une entrée secrète vers ses appartements, sa bibliothèque et son laboratoire. D’autre part, la dague magique était ornée d’inscriptions runiques, chaque côté comportant une partie de la prophétie suivante :

 

« Cette dague a fait couler le sang de R’Ishann. Un jour, elle la tuera.

Ce n’est qu’une fois que la magie l’imprègnera qu’elle pourra détruire R’Ishann. »

 

Résolvant l’énigme de ces inscriptions, notre élémentaliste se lia avec la dague pour nous donner une chance de vaincre R’Ishann que nous nommâmes : le Fléau de Farliss. En effet, triompher d’une Horreur majeure pour des adeptes de notre rang me semblait du suicide, il n’y avait plus qu’à prier pour que la dague remplisse son contrat.

 

Les talents de Sargosh nous permirent d’utiliser une chauve-souris en éclaireur, ainsi nous apprîmes que le chemin qui menait aux quartiers de Strathem était occupé par des créatures hostiles. Nous prîmes donc le temps de rentrer dans le mausolée où nous pûmes déduire que Farliss avait été dépouillé de sa dague par Strathem, très sûrement possédé par une Horreur, et cela de la pire des manières, un véritable pillage !

 

En priant Astendar pour son salut et après avoir tout fait pour rendre à Farliss une sépulture à la hauteur de son rang, nous nous engageâmes dans les appartements de Strathem. Deux Cadavéreux, de malheureux villageois, nous assaillirent aussitôt, le premier fut disloqué par les attaques combinées de notre élémentaliste et de Sargosh tandis que le second tombait sous mes coups d’épée large et des assauts tourbillonnants de Flip. Protégés par l’armure d’Air d’Anaya, nous réussîmes à mettre à mal deux autres Cadavéreux grâce à la maîtrise de la gravité de la sylpheline et des assauts répétés de mes compagnons. Au final, accédant enfin aux appartements de l’elfe, nous pûmes en apprendre plus sur la légende de Farliss, grâce à la bibliothèque du sorcier.

 

Farliss, le Grand avait combattu plusieurs Horreurs au cours de sa vie, notamment R’Ishann. Plusieurs batailles eurent lieu entre eux et au final, le troubadour réussit à prendre l’avantage sur l’Horreur sans jamais pouvoir la tuer, même avec la dague magique qu’il avait découvert et grâce à laquelle il avait déjà terrassé de nombreuses Horreurs. Dans le journal personnel de Strathem, nous apprîmes que l’elfe avait fait prisonnier R’Ishann au fin fond du kaer, mais qu’il n’avait pas pu la détruire, à cause du sort de bannissement qu’il lui avait lancé pour la capturer.

 

Attendant la libération de l’Horreur qui approchait à grands pas, Strathem s’était fait corrompre, petit à petit, et avait fini par tuer les villageois entrés dans le kaer, avant de les offrir à sa maîtresse qui en fit des Cadavéreux. L’elfe avait ensuite dépouillé Farliss de sa dague avant que l’Horreur ne l’achève. Il était temps pour elle de payer. Malgré le doute suscité par cette confrontation avec R’Ishann, nous entrâmes dans la pièce mentionnée dans les écrits de Strathem pour faire face au Fléau de Farliss.

 

Il n’y avait aucun doute, derrière la porte de la salle qui nous faisait face, sur laquelle des runes d’interdiction de sortie étaient apposées, se trouvaient R’Ishann et deux Cadavéreux, ainsi qu’un coup d’œil dans l’Astrale me permit de le voir. Nous entrâmes alors dans la pièce, une immonde créature tentaculaire, difforme, tel un Chaos insondable nous faisait face. A mes yeux, il fallait absolument que la dague de Farliss touche sa cible et pour cela je devais aider Anaya du mieux que je le pouvais. Dans le désordre du combat, nous vîmes arriver le Cadavéreux né de Strathem. Heureusement pour nous, ce dernier tomba au premier assaut, par maladresse, et j’en profitai pour faire en sorte qu’il reste au sol à jamais, craignant que ses pouvoirs nous atteignent.

 

Après nous être débarrassés des Cadavéreux, simple formalité, nous nous attachâmes à triompher de l’Horreur. Protégés par les cercles de magie nécromantique de Sargosh, nous réussîmes à stabiliser le combat mais l’Horreur, alertée par la menace de la dague, fit tomber Anaya inconsciente. Pendant que mes camarades tenaient tête au monstre, j’administrai une potion de guérison à Anaya un peu en retrait de la bataille, pour finalement revenir au combat et voir les lames tourbillonnantes de Flip terrasser l’Horreur. Pour en finir, Anaya administra un coup de dague au cadavre de R’Ishann et celle-ci disparut sans même revenir dans l’Astrale.

 

Après un peu de repos, nous retournâmes au village et après avoir expliqué au maire la situation, nous l’accompagnâmes sur place pour appuyer nos dires. Sur ses ordres, nous brûlâmes les corps, l’après-midi durant, pour ne pas que les villageois puissent apercevoir les méfaits du Fléau de Farliss. Tandis que nous inspections le kaer, nous vîmes sur le mausolée de Farliss une gravure sur son fronton qui n’était pas présente lors de notre arrivée, probablement l’œuvre de l’esprit du troubadour, selon nos lanceurs de sorts. Ce dernier nous remerciait et nous accordait de prendre sa dague afin de perpétrer la purification de Barsaive des immondices de l’Astrale. Nous fîmes tous une prière en son honneur et lui rendîmes un ultime hommage. Sur ce, nous regagnâmes le village et profitâmes quelques jours de son hospitalité.